Cirque/Rue

L'Homme qui Machine

Du 1er au 4 novembre 2018

Toulouse
Toulouse

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À Montaudran, la Halle de la Machine ouvre ses portes et le Minotaure atterrit sur la piste. Arpenteur de paysages et créateur de machines de ville, François Delaroziere raconte, et c’est précis, car en mécanique comme au théâtre, la force niche dans les détails.

Premier acte spectaculaire de votre implantation à Toulouse : vous lâchez un Minotaure géant dans la ville. Pourquoi un Minotaure ?
En me promenant dans Toulouse, je me suis perdu dans les rues et la question du labyrinthe est apparue ! et donc l’idée du Minotaure.
La connexion avec le mythe, Dédale, Icare, et on rejoignait la « formulation » toulousaine, industrielle, historique, avec les pionniers de l’aviation. Le Centaure, mais aussi Pégase, c’est ce mythe de l’élévation. Et puis la rue du Taur, Matabiau bien sûr, et le lien avec l’Espagne… Le Minotaure va quitter les galeries souterraines qui rejoignent les continents en passant sous les océans par la porte toulousaine. Il va se perdre ensuite dans le labyrinthe de la ville accompagné de La Grande Araignée… comme si tout à coup, on lâchait deux animaux sauvages dans la ville, des animaux de douze mètres de haut qui pèsent entre 38 et 47 tonnes !
Ce n’est pas un défilé de machines, comme un carnaval, c’est un récit sur quatre jours, et qui ouvre sur un deuxième volet avec l’inauguration de la Halle où on pourra ensuite venir voir les protagonistes du spectacle vivre là.

C’est une implantation à Toulouse très attendue...
On cherchait une ville pour accueillir notre activité spectacles. Il y a huit ans nous nous sommes donc rapprochés de Toulouse, d’autant plus que nous avions notre siège social à Tournefeuille, à L’Usine. Le projet initial prévoyait une installation à la Cartoucherie, et puis cette Halle a été construite à Montaudran. C’est un projet que nous aimons, on l’avait dans nos cartons, mais nous n’étions pas pressés…
Un projet différent de celui de Nantes donc…
Les Machines de l’île, à Nantes, c’est un projet forain, ce sont des architectures en mouvement implantées sur le territoire et qui restent là, visibles tous les jours de l’année.
À Toulouse, on est sur des objets de spectacle qui voyagent, issus de spectacles qui ont une histoire, un futur, qui partent et qui reviennent, c’est un port, un havre, avec des conteneurs tout autour. On n’aura pas ici la même relation aux objets, l’émotion sera différente.

C’est à dire ?
Avec les machines de spectacles, on rentre dans l’univers du théâtre de rue, mais aussi dans l’histoire du théâtre en général, on fait le voyage dans l’objet, son architecture, l’effet qu’il produit, son vécu, et ce sont de véritables machinistes qui créent à chaque fois un entre-sort, un petit spectacle unique toujours renouvelé. Une sorte d’improvisation générale. C’est une expression artistique différente. On peut parler d’exhibition, on exhibe des machines comme des ours !

Avec un Minotaure en produit d’appel, comme l’éléphant à Nantes ?
Avec la Cie la Machine, nous avons créé ce concept de « machine de ville », qui consiste à donner à une machine de spectacle une fonction citoyenne de transport de personnes, et une légitimité pour évoluer sur l’espace public, comme un autobus, ou comme une cathédrale… Nous créons une architecture en mouvement dans la ville, une architecture qui va évoluer au gré de son projet urbain, vivre avec un quartier. Mon expression passe par des machines, c’est donc effectivement le point commun avec Nantes, sauf que l’éléphant ne part pas en voyage.
Le projet est différent : ici les machines appartiennent à la compagnie, et c’est aussi la Machine qui va exploiter le restaurant et la boutique.

Vous êtes aussi très attaché à l’idée d’aménager un nouveau quartier, d’intervenir dans un projet urbain. Pourquoi ?
J’ai toujours été attiré et fasciné par l’espace public. Quand j’étais étudiant aux Beaux-Arts j’allais à Hambourg, je traçais une montre sur le plan de la ville, je tirais au sort des horaires et j’allais filmer des gens qui traversaient à 2h du matin, ou à 5h, ou en plein rush…
J’aime l’expression dans la ville : une des clés de l’épanouissement de nos sociétés, c’est d’arrêter de faire de l’entre-soi et de mettre la culture au cœur de la ville, de créer des perturbations qui vont pousser chaque citoyen, riche, pauvre, agriculteur, ingénieur, vieux ou jeune à avoir de l’audace et à se dire que oui, le paysage, l’extérieur est un terrain à prendre.

C’est aussi accepter la transformation ?
Vivre la transformation urbaine comme un acte noble. C’est beau à voir un chantier, on a tendance à cacher les grues, les travailleurs, à parler de désagrément, alors que la ville est un magma qui se transforme en permanence, et cette transformation du quartier doit devenir une vraie aventure.
C’est un secteur un peu ingrat, collé au périphérique, sans les quais ni l’ambiance maritime…
C’est justement un enjeu passionnant : comment faire vivre une piste de quarante mètres de large ? Nous sommes à dix minutes à vélo du centre ville, avec demain une station de métro.
On crée une nouvelle pratique, et cette grande percée qui permet d’éviter les rocades et les voies ferrées deviendra un fil rouge pour les vélos et les piétons, un lien entre les quartiers et vers Labège.

Et dans la Halle, que verra-t-on ?
C’est un peu une écurie, on vient voir les machines et ceux qui s’en occupent, les vétérinaires… les machinistes vont aller à la rencontre du public. De 60 à 80 machines, ou de 40 à 100… la scénographie sera sans cesse différente.

Les spectacles « éphémères » vous intéressent finalement moins que les pérennes ?
Tout m’intéresse ! la machine de spectacle, c’est celle qui intervient dans la ville pour une heure ou pour quatre jours, accompagnée d’effets, de musique, avec 80 manipulateurs, c’est un événement théâtral, un moment très émotionnel. Mais il y a aussi une autre forme qu’on pourrait appeler théâtre infusé, car il accompagne la vie au quotidien et infuse de la théâtralité dans l’espace urbain. Ce sont des histoires différentes, mais complémentaires.
Lorsque le Minotaure se réveille, il y a une théâtralité, celle de la ville, lorsque la lumière naturelle devient l’éclairage…
Propos recueillis par Pierre Lépagnol
et Virginie Peytavi

Photo : Rémy Gabalda

Site web : https://www.halledelamachine.fr/

Publié par Rédaction de Ramdam


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