Pinocchio

L’histoire n’appartient pas plus à Collodi que Pinocchio n’appartient à Gepetto : ce serait sans doute la seule morale à retenir de cette pièce, si toutefois il devait y en avoir une. Car Joël Pommerat ne fait pas de théâtre pour argumenter, prêcher une leçon ou servir une cause. Son seul et essentiel travail est de montrer. Né d’un arbre, Pinocchio est un petit être impatient, impulsif et fier, en proie aux tentations du monde et avide d’expériences. Derrière l’esprit d’aventure et d’émancipation qui caractérise le personnage originel, le metteur en scène fait ressortir ce qu’il nomme une « réalité fantôme » plus profonde, plus noire aussi : avidité, désir de s’enrichir, mensonges, confrontation à la violence de la société… Joël Pommerat réinvente librement le conte de Collodi en s’attachant à ce qui se glisse, s’immisce entre les phrases. L’attention portée à la lumière, à la qualité sonore, à la mise en scène saisissante, sans fioritures, participe aussi efficacement qu’un dispositif cinématographique à la dramaturgie du récit et en souligne toute la profondeur. Maëva Robert

Photo : Elizabeth Carrechio