Festival

matali crasset : "L'art comme puissance d'action"

Du 2 juin au 2 juillet 2023

Toulouse
Toulouse

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Nouveau format, nouvelle équipe, nouvelle saison… le Printemps de Septembre devient le Nouveau Printemps. Désormais annuelle, printanière, déployée à l’échelle d’un quartier, la manifestation change de forme mais suit sa ligne : exposer un état des lieux de la création contemporaine, à travers la diversité de ses formes et ses préoccupations les plus actuelles. Figure incontournable du design en France et artiste associée à cette première édition, matali crasset a imaginé pour le quartier Saint-Cyprien une programmation vivante, où l’art contemporain propose de nouvelles pistes pour habiter le territoire urbain.

En tant que designer, comment avez-vous abordé cette édition ?
Ma pratique m’amène à questionner la manière d’habiter le territoire. Face aux grands enjeux actuels (sociaux, environnementaux…), il y a une prise de conscience collective mais pas de reconfiguration concrète de nos modes de vie. À travers ma pratique, je réfléchi à comment nous pouvons faire face à ces enjeux. L’art nourrit une part importante de ma réflexion. Les artistes développent une relation sensible à un monde en mouvement. Nous devons nous aussi retrouver cette sensibilité, la partager collectivement, et l’art doit nous y aider. À travers cette édition, je propose l’art comme puissance d’action.

Quelles sont les problématiques qui ont guidé votre réflexion ?
Comment faire territoire dans le quartier Saint-Cyprien ? Comment faire famille avec les habitants, les équipes du festival, les artistes ? Voilà les questions que je me suis posées, sans perdre de vue la ligne fixée : faire de cette édition une invitation à réfléchir sur la construction d’une société en harmonie avec le vivant, et une incitation à agir. Il fallait donc que cette aventure soit collective, et que chacun puisse participer d’une façon ou d’une autre au processus créatif.

Qu’est-ce qui vous intéresse dans l’idée de mener une réflexion à l’échelle d’un quartier ?
La possibilité d’intégrer la réflexion de l’art contemporain dans la ville, en investissant les lieux culturels identifiés, comme le musée des Abattoirs, le théâtre Garonne, la galerie du Château d’eau ou l’hôpital de La Grave, mais aussi les interstices, comme le marché Saint-Cyprien, l’espace public, les vitrines des commerces. L’identité-même du quartier, avec la présence emblématique de la Garonne, a inspiré certaines propositions artistiques : je pense au Carrelet et au Moulin à Nef, deux micro-architectures installées en bord de Garonne, qui accueilleront des rencontres et des ateliers. Je voulais apporter à cette édition une forte dimension collaborative, en mobilisant habitants du quartier, étudiants, chercheurs, associations…

Quels sont les projets les plus emblématiques de cette forme collaborative ?
Les projets sont nombreux, mais Les Multipèdes Laineux est peut-être le plus emblématique. Cette communauté imaginaire en chutes de laines recyclées, à la croisée du monde humain et du monde animal, a été réalisée avec le concours d’élèves des lycées des Arènes et Joséphine Baker, les résidents d’un EHPAD et la MJC Roguet. Au théâtre Garonne, la Fabrique du Nouveau Printemps propose un espace d’expérimentation dédié à la production de petites éditions, animé par des étudiants en écoles d’art et ouvert à tous, car je trouve important de réserver un lieu à la création. Je pourrai également citer le Jardin des Herbes de Sainte-Monique proposé par le réseau Constructlab en collaboration avec les étudiants de l’école d’architecture, le personnel et les patients des Hôpitaux de Toulouse et les laboratoires Pierre Fabre.

Comment avez-vous choisi les artistes présentés ?
Certains sont des artistes que je connais de longue date, avec lesquels j’ai collaboré, d’autres sont des artistes que j’ai eu envie de rencontrer pour l’occasion. Ils ont en commun de véhiculer cette idée que l’art entretient un rapport sensible au vivant. Le musée des Abattoirs accueille les travaux de trois femmes artistes, précurseurs dans ce lien avec le vivant, qui depuis 50 ans font corps avec leur pratique : Claudine Monchaussé, Marinette Cueco et Cornelia Hesse-Honneger. J’ai imaginé un festival à plusieurs portes d’entrée, qui intègre de la vidéo, de la photographie, des installations, mais aussi des compositions sonores (Pierre-Yves Macé au marché Saint-Cyprien), une sculpture à danser (Hélène Bertin au théâtre Garonne), des drapeaux (Pierre La Police au jardin Raymond VI)… L’ensemble des propositions dresse une sorte d’état des lieux des enjeux liés à notre rapport à notre environnement : eau, mobilités douces, monde animal, monde végétal, habitat, etc.

À la Galerie du Château d’eau, vous présentez certaines de vos réalisations, des utopies domestiques pensées « aux antipodes de la maison cocon ». Que nous disent-elles de nos modes de vie ?
Ces propositions réalisées pendant le confinement ont été inspirées de lectures de philosophes écologues et d’anthropologues. La Maison de la restitution par exemple, propose un autre rapport aux déchets qui deviennent ressources. Elle nous rappelle que nous avons beaucoup pris à la nature, et que l’heure est venue de restituer. Ces projets ne sont pas faits pour être construits mais pour changer notre regard. Ils questionnent la notion de repli sur soi, de confort surprotecteur, et nous invitent à retrouver le monde extérieur et cohabiter avec le vivant.

Comment souhaitez-vous que le public s’approprie cette édition ?
Très simplement, en se déplaçant d’un projet à l’autre. L’échelle du quartier Saint-Cyprien permet de déambuler à pied, à son rythme. Les projets ont été rassemblés par pôles, que j’ai appelés « Fabriques » rassemblant chacune trois ou quatre propositions. Le théâtre Garonne sera le point de ralliement du festival, un lieu de vie où prendre un verre, discuter, assister à un concert ou un atelier.

Propos recueillis par Maëva Robert

Photo : Julien Jouanjus

Du 2 juin au 2 juillet, Quartier Saint-Cyprien, Toulouse.

Site web : https://lenouveauprintemps.com

Publié par Rédaction de Ramdam


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